La liste des ingrédients comédogènes est-elle fiable?


La liste des ingrédients comédogènes est-elle fiable? 


Les cosmétiques comédogènes définition


La notion des cosmétiques comédogènes a apparue dans les années 1970 suite aux travaux d’Albert Kligman. En 1989 James Fulton a classifié les ingrédients cosmétiques selon leur capacité d’obstruer le follicule pilo-sébacé (de former un comédon), l’indice de comédogénicité est né:

  • 0 – pas du tout comédogène
  • 1 – peu comédogène
  • 2-3 – moyennement comédogène
  • 4-5 – très comédogène 


Le tableau issu de ces recherches a été largement popularisé, on le voit sur les blogs et dans les médias qui apprennent aux consommateurs à repérer les ingrédients potentiellement comédogènes dans leurs cosmétiques. 

Voici ce fameux tableau des ingrédients cosmétiques avec leurs indices de comédogénicité

indice de comédogénicité

indice de comédogénicité

indice de comédogénicité




Pourquoi ce tableau a autant de succès? Parce que l’idée de pouvoir maîtriser ses problématiques cutanées en éliminant certains ingrédients cosmétiques paraît simple et logique. Pour nous, les  consommateurs, il est toujours plus rassurant d’isoler une cause extérieure en espérant de retrouver une jolie peau. Malheureusement ce concept a ses limites et voici pourquoi.

L’oreille de lapin vs la peau humaine


Fulton a utilisé le modèle animal pour tester les ingrédients cosmétiques. Bien plus pratique que la peau humaine, les modifications dans le follicule pilo-sébacé chez les lapins sont visibles au bout de 15 jours seulement alors que cela peut prendre jusqu’à 6 mois dans le modèle humain.

Pourquoi le modèle animal est-il critiquable? Mettons de côté l’aspect éthique et regardons de plus près la morphologie. L’oreille de lapin n’a pas la même structure que la peau humaine. La couche cornée est très peu développée, sa sensibilité est supérieure. En plus de cela les pores sont plus larges et ont tendance à produire des réactions acnéiques plus facilement.

Ce que l’on retient de cette étude: 

"Les ingrédients non comédogènes sur l’oreille de lapin ne le sont pas sur la peau humaine. Les ingrédients très comédogènes sur l’oreille de lapin ne sont pas aussi comédogènes sur la peau humaine." 

Pour résumer: ce qui va être comédogène pour un lapin ne le sera pas forcément pour un humain. Par conséquent on ne retiendra que des ingrédients absolument négatifs (indice 0) pour la peau humaine. 


Les tests réalisés sur le modèle humain ne correspondent pas aux conditions d’utilisation réelles


En prenant en compte les limites du modèle animal, quelques produits cosmétiques finis ont été évalués en 2006 en utilisant exclusivement le modèle humain. 

Conclusion de cette étude : 

"les produits cosmétiques finis utilisants des ingrédients comédogènes ne sont pas nécessairement comédogènes." 

Pourquoi on se pose des questions: 

  • L’étude utilisais un petit échantillon de 6 personnes ayant une prédisposition à former des comédons 
  • Les tests ont été effectués sur la peau du dos
  • Les produits cosmétiques testés ont été appliqués en grande quantité et recouverts par un pansement 3 fois par semaine pendant un mois.

On comprend bien que les tests n’ont rien à voir avec les conditions d’utilisation réelles. Comment réagira la peau du visage lors d’une application quotidienne et sans occlusion? Que passera-t-il si l’utilisation dépasse un mois? 


Tout dépend de la concentration et du solvant 


Prenons l’exemple de ces deux ingrédients largement utilisés par les fabricants cosmétiques:

Isopropyl myristate
Isopropyl myristate pur 100% = indice de comédogénicité 2-3 
Concentration de 10% diluée dans le propylene glycol = indice de comédogénicité 1-3
Concentration de 2,5% diluée dans le propylene glycol = indice de comédogénicité 0

Isopropyl Isostearate
Isopropyl Isostearate pur 100% = indice de comédogénicité 4 
Concentration de 50% diluée dans l’huile minérale = indice de comédogénicité 2-3
Concentration de 5% diluée dans l’huile minérale = indice de comédogénicité 1-2

L’indice de comédogénicité varie en fonction de sa concentration et du solvant utilisé. Il est quasiment impossible pour un consommateur de savoir le pourcentage exact utilisé dans la formulation et encore moins prévoir toutes les interactions avec d’autres ingrédients. 


Les réactions individuelles peuvent varier


Chaque état de peau est une combinaison unique de biologie et morphologie cutanées, mode de vie, environnement… Le même ingrédient va se comporter différemment selon la personne qui l’utilise. 


Qui a l’intérêt d’utiliser l’indice de comédogénicité?


L’indice de comédogénicité peut vous guider dans votre choix des produits cosmétiques:

  • Si votre peau produit facilement des réactions acnéiques
  • Si vos pores sont dilatés
  • Si vous avez tendance à réagir aux produits cosmétiques
  • Si vous avez peur d’utiliser de nouveaux produits


Comment bien utiliser l’indice de comédogénicité?


  • Quand l’ingrédient est appliqué dans son état pur. C’est le cas des huiles, des beurres et des cires botaniques. 
  • Quand les ingrédients à indice élevé (indice 4-5) figurent en haut de la liste INCI (vérifiez les 5 premiers ingrédients). Si c’est le cas ils peuvent être responsables de vos réactions cutanées. 
  • Quand le produit cosmétique revendique une composition spécialement développée pour les peaux réactives à tendance acnéique et ne comporte que des ingrédients absolument négatifs (indice 0-1). 

Ce qu’il ne faut pas faire:

  • Vérifier les ingrédients au-delà de la 5ème position de la liste INCI. 
  • Jeter les produits que vous utilisez et qui vous conviennent alors qu’ils contiennent quelques ingrédients à indice élevé.

En conclusion, l’indice de comédogénicité permet dans certaines situations de limiter les risques d’apparition des imperfections, c’est à nous de l’utiliser judicieusement sans transformer l’analyse de la liste INCI en « chasse aux sorcières ». 

Et vous, utilisez-vous le tableau des ingrédients comédogènes pour choisir vos cosmétiques ? 



Sources: 


ZD Draelos and JC DiNardo, A re-evaluation of the comedogenicity concept, J Am Acad Dermatol 2006, 54, 507-512.

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